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Deuxième année

27 Octobre 2012 , Rédigé par Michèle Publié dans #ma vie de femme mariee

Deuxième année

Nous commençons notre deuxième année de mariage à la Brévine. Complètement immergée dans mon noueau rôle de maman, je nage dans le bonheur. Mon fils est un adorable bébé, et c'est pour moi une expérience riche en émotions que de le voir grandir, s'ouvrir à la vie en découvrant chaque jour un peu plus de ce monde qui l'entoure, et cette nouvelle vie qui se développe en moi me conforte dans cette idée folle que je serai une bonne mère... Mon mari, que je vois peu, est pareil à lui-même. Un bon père, qui prend le temps de jouer avec Matthias, un travailleur infatiguable, un ami fidèle à ses copains de beuverie. Pas alcoolqiue, mais bon noceur, il rentre bourré un à deux soirs par semaine, ce qui donne lieu à des disputes quelques fois violentes( je me rappelle qu'une fois il a cassé un biberon de notre fils, histoire de "me montrer qui commande chez lui", ce qui me plongera pendant deux jours dans une peur viscérale d'avoir remis les pieds dans l'enfer vécu avec Vait). Mais je me fais une raison: mon mari m'aime, il est fier de la tite famille que nous formons, et surtout je l'aime cet homme, il me fait rire, me rassure (la plupart du temps!), me fait bien l'amour, j'essaie de me montrer digne de ce bonheur qu'il me donne, tout en me disant que je le mérite pas... C'est en septembe 94, six semaines après la naissance d'Océane que nous déménageons (dans ce qui va devenir pour moi au fil des années une prison), aux Prises pour reprendre la ferme de son père. Je suis sur un nuage, mes deux enfants disposeront du plus beau terrain de jeu qui soit (la nature), mon mari donnera enfin un sens à sa vie, moi j'aurai enfin de l'occupation (oubliée ces heures de sieste de Matthias passées à me demander comment je vais m'occuper), et, bonne nouvelle, Patrick, mon beau-frère habitera avec nous, pour des raisons pratiques (son domaine est plus près de chez nous que de chez ses parents)... Je suis curieuse de vivre cette cohabitation, persuadée que ça sera un plus enrichissant pour mes enfants de grandir dans cette famille "élargie", me réjouissant de cette complicité (logique) qui va s'installer entre lui, mon mari et moi, pressée d'apporter à ces deux hommes détruits par un même drame une famille unie, pleine de joie, de rires, de...disons-le bonheur. Ce que j'ignorais, c'est qu'ils n'en voulaient pas de cette famille à deux balles. Le lendemain de notre déménagement, à l'heure d'aller chercher les vaches au pré (il était logique que ce soit à moi de le faire, Olivier ayant autre chose à faire), Océane réclame son biberon. Ni une ni deux, je me dépêche de le lui donner avec un stress grandissant ( persuadée que je suis que c'est le bon choix de faire passer notre fille avant les animaux, surtout qu'en général Océane est rassasiée en mois de dix minutes), surtout que je vois Olivier par la fenêtre qui se dirige vers les vaches pour les ramener. Paniquée à l'idée d'être en retard, consciente de ne pas répondre à l'attente de mon mari, je remets ma fille dans son lit, et pique un pas de course pour rattrapper mon homme en lui disant: "pardon, je suis en retard, mais c'est bon, je rentre les vaches, tu peux faire autre chose pendant ce temps." Sa réponse fut pour moi une vraie baffe: "Fous le camp, j'ai pas besoin de toi, démerde!"... C'est en forêt que j'irai verser mes premières larmes, à l'abri des regards, essayant de comprendre l'attitude injuste de mon mari. Ces mots, prononcés sur le coup de la colère, résonnent encore en moi, première demonstration de sa part de mon incapacité à le seconder efficacement (il dira un jour à ma famille que ce que je fais même un singe y arriverait mieux que moi), premier signe de mépris pour la peine que je me donne à assimiler un métier que je déteste, premier rejet de ces efforts que je fais pour lui plaire. L' humiliation est d'autant plus grande que les voisins ont assisté à cette scène. Ce jour-là, je sors de la forêt bien décidée à ne jamais reproduire cette situation, ayant assimilé que je dois faire passer les besoin de mon homme avant ceux de mes enfants... Grave erreur, dont les victimes innocentes seront marqués par cette idée que le travail passe avant eux.Ce n'est que le lendemain que mon mari me reparlera en me faisant comprendre que si je veux rester auprès de lui, il faudra que je le laisse me guider, me commander, me dire ce que j'ai à faire, ne jamais m'opposer à lui, accepter de lui obéir, sous peine de me trouver à la rue si je faillis à ses volontés. J'accepte, terrorisée à l'idée de voir mes enfants grandir sans leur papa à cause de moi. Cette seconde année de mariage est marquée par tellement d'autres scènes comme celle-ci, au cours desquelle mon mari en sort vainqueur à chaque fois, appuyé par son frère, qui trouve très intéressantes nos disputes, et à qui je n'arrive pas à faire comprendre mon besoin d'intimité pour fonder une vraie famille. Au fil du temps, j'ai rapidement arrêté d'essayer de montrer mon désaccord avec mon mari. Je me rends compte que je suis incapable de tout, que mes décisions sont toujours mauvaises, que je suis "bête comme mes pieds", qu'il n'y a que lui qui sait. Moi je laisse ce sentiment de sous-estime de moi m'envahir, si il gueule de cette façon c'est qu'il a raison, je suis une merde, mon mari et son frère me l'ont bien fait comprendre. C'est dans cet état d'esprit que je passe mon premier hiver là-bas, passant régulièrement 18 heures par jour à soigner les animaux, m'occuper de nos enfants, faire à manger, le ménage, la lessive, essayant encore en plus de faire de notre maison un vrai foyer... Sans jamais une quelquonque reconnaissance de la part de mon mari on de son frère pour tout ce que je m'épuise à faire. De leur point de vue, je suis une "flemme", une de ces "pétasse de ville", qui "fout rien de ces journées". Epuisée, je n'ai plus la force de réagir... Cet état de fait, il me faudra 18 ans pour m'en défaire...

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